C’est un véritable cri du cœur que la Coordination des Associations de Presse (CAP) a lancé ce mardi 29 avril 2025 au niveau de la Maison de la Presse Babacar Touré. Face à une salle comble, dans une déclaration lue par Ibrahima Lissa Faye, les représentants de la presse sénégalaise ont exprimé leur colère, leur inquiétude… mais aussi leur détermination. Car pour eux, ce n’est plus une simple crise : c’est une tentative claire d’asphyxie du secteur.
Depuis mai 2024, les signaux d’alerte se multiplient. Mais ce mois d’avril a marqué un tournant brutal. En ligne de mire : l’arrêté ministériel du 22 avril 2025, signé par le ministre de la Communication Alioune Sall, qui ordonne la fermeture immédiate de plusieurs médias jugés « non conformes ». Une vingtaine de responsables ont déjà reçu une assignation par la Direction de la Surveillance du Territoire (DST). Et ce n’est que le début : plus de 300 organes de presse pourraient être frappés par cette mesure.
« On nous pousse à l’autocensure »
Ce que dénonce la CAP, au-delà de l’arrêté, c’est le flou entretenu par les autorités. Aucune notification claire, aucune justification sur les rejets, une plateforme d’enregistrement fermée depuis février… Résultat : des rédactions entières sont dans le flou, ne sachant même plus si elles peuvent continuer à publier.
« On pousse les journalistes à l’autocensure, à la peur. Et c’est précisément ce que nous refusons », martèle un membre de la CAP, visiblement ému.
Une presse qui suffoque, comme George Floyd
Dans une image forte et dérangeante, la CAP a comparé la situation actuelle de la presse à celle de George Floyd, ce citoyen afro-américain mort étouffé sous le genou d’un policier. « La presse sénégalaise ne peut plus respirer. Ceux qui devraient la protéger sont ceux qui l’écrasent », ont-ils lancé.
Depuis la nomination du ministre Alioune Sall, plus aucun dialogue réel n’a eu lieu avec les acteurs du secteur. Le Fonds d’Appui et de Développement de la Presse (FADP) est bloqué. Les cartes de presse ne sont plus délivrées. Le Conseil national de Régulation de l’Audiovisuel (CNRA) est paralysé. Et le silence du gouvernement devient assourdissant.
Une riposte collective en préparation
Mais la presse sénégalaise ne compte pas rester les bras croisés. La CAP prépare un plan d’action musclé : dépôt collectif de recours devant la Cour Suprême, accompagnement juridique des médias sanctionnés, rencontres avec les syndicats, les ONG, la société civile… Et un grand sit-in est prévu devant les locaux du ministère de la Communication.
Une Assemblée générale se tiendra également le 17 mai pour redonner un nouveau souffle à la CAP, récemment restructurée avec l’arrivée de nouveaux visages à la tête du SYNPICS et de la Convention des Jeunes Reporters.
« La presse a toujours été le rempart de notre démocratie », rappelle la CAP. Et aujourd’hui, ce rempart vacille. Mais il n’a pas encore cédé.