Le ministère de la Communication, des Télécommunications et du Numérique a levé le voile, ce jeudi, sur les résultats d’un vaste travail de diagnostic et de cartographie du secteur des médias au Sénégal. Présenté par Habibou Dia, Directeur de la communication, ce rapport met en lumière de nombreuses irrégularités, mais aussi des orientations stratégiques ambitieuses, sous le signe de la restructuration, de la régulation élargie et de l’accompagnement financier.
Un paysage radio saturé et anarchique
Premier constat marquant : le désordre dans la gestion des fréquences radio. « Le Sénégal est arrivé à saturation. Il n’y a plus de fréquence FM disponible, alors même qu’une recommandation internationale préconise une transition vers le numérique », a révélé M. Dia. Environ 400 fréquences seraient ainsi « dans la nature », non encadrées, et appelées à être reprises par l’État dans le cadre de cette réforme. Cette situation illustre le besoin urgent de réorganiser l’espace audiovisuel sénégalais.
Une régulation plus large, au-delà des médias classiques
Le rapport réaffirme la volonté des autorités de mettre en place une Autorité de régulation des Médias et de la Publicité, dotée de compétences étendues. Contrairement au projet initial de Haute autorité de régulation de la communication et de l’audiovisuel (Harca), jugé trop limité, cette future entité aura autorité sur l’ensemble des canaux d’information : médias traditionnels, numériques, réseaux sociaux, journalistes et influenceurs.
Conformité : seuls 258 médias sur 639 sont en règle
Le diagnostic révèle aussi un profond problème de conformité : sur les 639 médias recensés, seulement 258 respectent les exigences du Code de la presse. Et encore, ces derniers doivent passer une seconde phase d’évaluation, portant notamment sur les cotisations sociales (retraite, assurance maladie), la fiscalité et le respect des obligations décrétales. Un processus rigoureux, mais présenté comme indispensable à un assainissement durable du secteur.
Une restructuration sans volonté d’étouffer
Conscient des inquiétudes que suscite une telle réforme, Habibou Dia a tenu à rassurer : « L’objectif n’est pas d’endiguement ni d’étouffement, mais bien le relèvement de la qualité ». Il a notamment évoqué les contraintes techniques que rencontrent les médias en ligne. Par exemple, aucun site d’information n’est actuellement hébergé au Sénégal, en violation de l’article 172 du Code de la presse, mais l’État préfère accompagner plutôt que sanctionner.
Un soutien financier pour professionnaliser les entreprises
Pour appuyer la restructuration, l’État a mobilisé 400 millions de FCFA à travers l’Agence de développement des PME (Adepme), dans le cadre d’une phase pilote. Douze entreprises seront accompagnées, avec une enveloppe minimale de 32 millions de FCFA chacune. L’objectif ? Permettre aux acteurs de l’audiovisuel d’accéder à des ressources humaines et techniques adéquates, et de supporter les coûts de déploiement de contenus de qualité.
Cette réforme ambitieuse marque ainsi un tournant dans la gouvernance du paysage médiatique sénégalais. Entre rigueur réglementaire et accompagnement financier, l’État trace une nouvelle voie vers un secteur plus professionnel, plus transparent, et mieux adapté aux enjeux numériques contemporains.